Zone libre

Zone libre

Le choix

Une fois n’est pas coutume je suis perturbé…

Bon il faut dire que j’ai fait ma "semaine psy", analyse, psychiatre et tutti quanti, ça use et ça remue les méninges, je vous le conseille si jamais vous avez la sensation de vous ramollir !

 

Au départ je pensais que c’était le projet de loi sur la burqua ou bien le procès Pasqua qui était la cause de mon tracas, mais en fait non.

Certes l’histoire du volcan m’a fait assez plaisir, et durant quelques jours bien trop courts j’ai caressé le fol espoir d’un monde débarrassé de sa dépendance à cette saloperie de pétrole, un monde ou le temps redeviendrait une vertu et non l’objet de toutes les spéculations.

En clair un monde ou le temps se vivrait au lieu de se perdre et de chercher à être rattrapé.

 

Mais là aussi ma belle utopie a fait long feu.

Sale période pour les rêves.

 

Mon psychiatre, un type en or s’il en est, m’a dit tout à l’heure une chose que je savais mais qui m’est arrivée en pleine figure comme une bombe.

Nous parlions de ce qui déclenche une remise en question, où l’on s’arrête avant de tout faire exploser et surtout quelle part de notre identité tentons-nous de faire transparaître dans nos actes ?

Pour faire un poil plus simple, se complaire dans la douleur fait partie de l’identité du sujet, du moins le croit-il, et donc cette révolte exprimée l’étant fort violemment elle en devient évidemment destructrice.

Le second point concernait l’usage des produits et de certains comportements comme des remèdes à nos maux.

En toute simplicité je lui ai dit que je savais fort bien que les produits, quels qu’ils soient sont au mieux des béquilles chimiques qu’il faut surtout utiliser le plus temporairement possible, et au pire des leurres évidents de nos propres faiblesses.

Il m’a bien remis en place !

Il m’a dit « Mais rappelle-toi il n’y a pas si longtemps l’usage que toi-même tu faisais de certains produits. Ils étaient bels et bien des remèdes pour toi. Le problème est qu’à long terme ils deviennent nocifs et destructeurs ».

 

Soit docteur ! Une fois de plus vous avez vu juste. En effet j’ai une fâcheuse tendance à ne pas toujours me souvenir avec exactitude d’où je viens.

 

De là nous parlâmes de cette incapacité que peuvent avoir les toxicomanes à dissocier la dope de leur identité. Il m’a confirmé que la quasi-totalité de ses patients (il bosse à Marmottan donc ne voit que des toxicos) étaient confronté à ce problème.

« Ne vais-je pas perdre mon identité en arrêtant la came ? »

 

Ça m’a rassuré quelque part car c’est ce qui a rendu mon sevrage si compliqué. Pas le produit en soi, mais bel et bien le couple que lui et moi formions.

 

Nous avons parlé d’autres sujets plus ou moins pointus, plus ou moins « techniques », et enfin il a dit ce qui résonne encore entre mes oreilles.

« Ce qui est important est de faire un choix. On ne cherche pas à savoir s’il est bon ou mauvais, c’est trop subjectif, mais il est important de faire ce choix et de l’assumer. C’est ainsi que l’on avance ».

 

Bon, je sais dit comme ça ces quelques phrases n’ont pas vraiment de sens, enfin je sais qu’elles en ont pour certains, c’est déjà ça…

 

Néanmoins j’ai évidemment ramené ça à mon expérience personnelle.

Et c’est troublant de vérité.

 

Il m’a d’ailleurs fait remarqué que bien avant de faire le choix de me soigner, j’avais déjà fait celui, inconsciemment, de survivre et de poser moi-même des limites m’indiquant jusqu’où je pouvais ou non aller au sein de ce western moderne qu’est la toxicomanie.

Et il a raison. Je n’ai pas tout fait exploser, j’ai été loin, très loin, trop loin, mais j’ai su conserver un semblant de structure, une certaine ossature qui me permettait de ne pas sombrer totalement.

 

Ma vie ressemblait à une sculpture de Giacometti pour le coup.

 

Puis il est vrai que j’ai fait ce choix fondamental de vivre et d’être maître de cette putain de vie.

 

Choix douloureux, compliqué, hasardeux mais si excitant au final.

Je dis bien « au final » car au départ il n’est que douloureux et atrocement laborieux.

 

Si je me sais désormais plus assuré dans ma vie, si j’ai trouvé la femme de ma vie, celle avec qui j’aurais des enfants.

Si je regarde avec de plus en plus d’optimisme et de fierté devant moi je n’en oublie pas pour autant ce qui a façonné mon histoire.

 

Je n’oublie pas les choix que j’ai du faire, ceux qui m’ont soutenu mais qui ne sont rien face à la solitude que l’on éprouve au moment du dit choix.

 

Je ne nie surtout pas que mon parcours à moi est bien spécifique, que s’il m’autorise à donner mon avis sur certains points il ne me permet en aucun cas de dire à quiconque ce qu’il doit faire, quels choix il doit prendre.

 

Et pourtant je le vois bien, j’aimerais pouvoir lui dire que le plus dur est de faire ce choix, qu’ensuite le cercle vertueux nous emporte et nous porte.

Mais son parcours n’est pas le mien, et si je l’aime tant c’est pour ce qu’elle est, pas pour ce qu’elle serait si elle faisait les mêmes choix que moi.

 

Bonne soirée



21/04/2010
0 Poster un commentaire

Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 2 autres membres