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Après la tempête

J'ai bien cru qu'on ne s'en sortirait pas de cette histoire ! De quelle histoire ? Et bien de cette tragédie grecque à la sauce FMI que l'on nomme fort à propos « l'affaire DSK »…étonnant moment médiatique, sociologique, politique et, on peut le dire, philosophique.
J'ai eu plusieurs fois envie d'enfourcher mon clavier afin de venir ici déverser mes sentiments rapport à la dite affaire. Certes enfourcher un clavier pour écrire n'est pas chose aisée, peut-être est-ce pour ça qu'on me reproche souvent d'écrire comme un pied en fait…J'en parlerais à Georges Tron, ça devrait l'exciter, mais si j'aime donner du plaisir à mes amis j'ai une propension bien moindre à le faire pour mes ennemis. Et jusqu'à preuve du contraire Tron est mon ennemi. Bien qu'il soit également un film culte pour tous les garçons de mon âge….Ah quelle ironie. Mais passons…

Donc c'est vrai que j'avais envie de, moi aussi, donner mon avis sur LE sujet du moment. Pourquoi pas ? Tout le monde donne son avis et préjuge de ce que sera le procès et son verdict, alors il n'y a finalement aucune raison objective pour que je me contienne.
Et pourtant je ne l'ai pas fait. Non pas par snobisme (parler de ce dont tout le monde parle peut sembler assez peu excitant il est vrai) car je ne nie pas que cette affaire m'a subjuguée et, dans une moindre mesure, passionnée. Non, la raison en est toute autre je crois bien, elle est simplement le résultat d'une grande confusion mentale, comme un tiraillement entre mes émotions, un déchirement entre ce qui est, ce qui pourrait être, ce qui doit être et ce qui sera. Lorsque je me suis rendu compte qu'il m'était compliqué, voire impossible, d'avoir une pensée construite et cohérente sur le sujet j'ai décidé de laisser retomber un peu le soufflet afin de réussir à construire ma réflexion en évitant toutes les pollutions médiatiques qui nous ont assaillies au cours des dernières semaines.

Le traitement médiatique de cette affaire est sans précédent. J'ai entendu le résultat de plusieurs études qui mettaient en évidence la masse incommensurable de données relatives au sujet qui fut déversée dans le marigot médiatique sans retenue ni finesse. En gros c'est comme si chaque adulte Français avait lu, vu ou entendu 137 fois par jour une info concernant l'affaire et ce durant plusieurs jours. C'est phénoménal. Mon Pierrot de cousin, ou cousin de Pierrot les deux formules sont acceptées, a eu cette réflexion bien sentie : « depuis le loft on n'a pas connu pareil phénomène qui fait que tout le pays est connecté sur la même information ». Ce n'est pas la moitié d'un con mon cousin, il faut le savoir. Par contre j'apporterai un bémol à cette affirmation, le loft en 2001 fit un buzz énorme, certes, néanmoins il y eut des franges de la population qui restèrent relativement hermétique à la chose. Je n'ai pas souvenir que mes parents ou mes grands-parents en furent très préoccupés. L'affaire DSK touche absolument tout le monde, tant et si bien que des enfants en sont arrivés à demander à leurs parents ce que signifie « violer une dame de ménage » ! Véridique….et très significatif du battage médiatique.
Personnellement c'est en allant pisser dans la nuit du samedi 14 mai au dimanche 15 mai que, regardant le cadran de mon téléphone, je constatais qu'un ami proche, résidant New-Yorkais, m'avait écrit les mots suivants « DSK arrêté pour agression sexuelle, c'est mort pour 2012 ! ». Bon, il faut savoir qu'au sein de mon cercle d'amis aussi le débat du « il faut voter utile même si c'est DSK » faisait rage. Je ne vous étonnerai pas en disant que j'étais absolument décidé à ne jamais voter pour ce gars-là, ce qui me valait à l'époque les foudres de certains de mes plus chers camarades. Au moins de ça on ne parle plus, c'est déjà ça de gagné.
Donc en me recouchant je dis à Constance un truc du genre « DSK est en taule…agression sexuelle….ça craint ». Il était tard. Alexis (2 mois au compteur) dormait profondément et nous en profitions pour faire de même, c'est certainement pourquoi à ce moment précis la réaction de ma douce fut des plus mesurée. Elle se résuma à une sorte de grognement qui, croyez-le ou non, en était sexy ! Cette femme est formidable, elle pourrait dire ou faire n'importe quoi elle restera toujours d'une grâce, d'une beauté, d'une finesse et d'une classe sans égal ! Mais ça n'est pas le sujet…
C'est donc bel et bien le dimanche matin qu'a débuté le ramdam…et quel fut-il !!! La vache….un tsunami de fausses infos, une tornade de rumeurs, une avalanche de conneries plus moches les unes que les autres. J'avais la sensation d'être une oie que l'on gavait et pourtant impossible de me décoller de la radio ou d'I-télé tout en cliquant frénétiquement sur les sites Internet susceptibles de m'offrir quelque information à me mettre sous la dent. Captivé, subjugué….c'est moralement on ne peut plus douteux, et j'ai moi aussi fait le voyeur. Il m'en fallait plus, toujours plus, j'en étais à aller consulter la bio de Ben Brafman et de ses précédentes affaires ! La folie me gagnait lentement tout comme elle gagna le pays et peut être même une partie du monde !
Il y eut des dérapages, le contraire eut été étonnant voire incompréhensible. Il y eut des débats stupides, des théories fumeuses sur l'inconscient du bonhomme qui se suicidait politiquement furent développées par des gens, habituellement, fort brillants, il y eut des images violentes, des mots violents, des idées violentes…ben oui la première chose qui me frappa, avant l'effarement consécutif de l'abondance d'informations (ou de non informations, en tout cas de bruit), c'est bel et bien la violence.
Violence des faits reprochés, violence de ces images d'un homme humilié, violence du traitement médiatique de la « présumée » (j'en peux plus de ce mot « présumé »…au secours !!) victime, violence des prises de position effectuées sous le coup de l'émotion, de la colère ou de l'empathie, violence incroyable de ce fait divers tellement représentatif de ce que devrait être la lutte des classes ! Quoi de plus méprisable que le dominant qui impose au dominé contre son gré ? Sempiternel constat de la stratification inévitable des sociétés…comme quoi on ne fait que reproduire, encore et encore.
J'étais choqué tant par l'inconcevable histoire que nous vivions en direct que par la violence du fond et de la forme. Le direct fut également, à mon avis, pour beaucoup dans la perception déformée, grossie, outrancière de la réalité. Comme la prise d'otage sur l'aéroport de Marseille il y a une vingtaine d'années qui se termina par l'intervention du GIGN, ou bien les attentats du 11 Septembre 2001, nous vivions en direct ce qui se passait. Aucun filtre n'était appliqué, les journalistes en étant réduits à se faire des porte-paroles de Twitter. Ah ça l'ego des journalistes en a pris un sacré coup…néanmoins il serait totalement absurde de conclure que les journalistes ne servent plus à rien, ça serait une erreur grossière. Par contre que le journalisme doive se remettre en question, voire se réorganiser n'est peut-être pas si stupide que ça.

Le scénario de cette histoire est quand même incroyable. Cet homme promis à un destin national, déjà tout en haut de la pyramide mondiale, qu'on décrit comme le second personnage le plus puissant au monde derrière notre bon Barack, qui commet l'acte le plus abject qui soit : le viol ! Et pas dans n'importe quelle condition…aucun scénariste n'aurait pu imaginer ça. En tout cas il n'aurait jamais pu le vendre. L'expression la réalité dépasse la fiction n'a jamais été aussi vraie, à mon avis en tout cas.
Alors finalement ce qui s'est passé on s'en fout un peu. Qu'il soit coupable ou non, qu'il soit victime d'un coup monté ou non…on s'en bat l'œil ! Enfin moi, personnellement, je m'en branle un peu j'avoue…Tout comme le fait que Georges Tron soit lui aussi coupable d'agression sexuelle, et pourtant la résonnance qu'a cette histoire par rapport au chef d'œuvre DSK est assez frappant.
Finalement que les gars soient des queutards patentés, tirent toutes les gonzesses qu'ils croisent, qu'ils soient fétichistes des pieds ou aiment se faire fouetter par des gourgandines gainées de cuir noir quelle importance ? C'est vrai ça, ça intéresse qui ?
Et bien c'est là que je me suis quand même posé une drôle de question : Et si ça reflétait simplement un des aspects les plus vils de la nature humaine en général et du comportement des hommes de pouvoir en particulier ?
Je dois avouer que j'ai eu (et certainement ai-je encore un peu) une certaine empathie à l'égard de DSK. Non pas que je fus saisi d'un quelconque réflexe quasi-corporatiste qui me poussait à défendre le mâle en tentant de minimiser ses actes, non en fait c'est que DSK on le connait depuis longtemps. On a même l'impression de bien le connaitre, alors que Nafissatou Diallo qui a vu son visage ? Ben personne, il est compliqué pour moi d'avoir de l'empathie pour quelqu'un que je ne connais pas. J'ai pourtant bien de l'empathie pour les victimes de la Shoah, mais si j'appelle ce sentiment empathie je le soupçonne d'être plus complexe que ça. Donc oui, j'avais de l'empathie pour l'homme DSK. Pourtant ce type est politiquement tout ce que j'exècre. Le fait qu'il se dise de gauche est certainement une des raisons de ma défiance à son égard. Certes le fondement de son discours politique est sans ambiguïté, à savoir social-démocrate, économiquement libéral qui consiste à dire qu'il faut enrichir les pauvres ce qui aura pour effet d'enrichir les riches. Alors que le conservateur dira l'inverse, enrichissons les riches pour enrichir les pauvres. La différence est fondamentale et bien évidemment qu'une des deux options obtient ma faveur….mais par défaut, uniquement par défaut.
Donc DSK n'est pas ma tasse de thé, et je suis ravi qu'il ne fasse pas partie du jeu de la présidentielle, vraiment ravi. Par contre je ne peux me réjouir qu'il soit sorti du jeu de cette manière-là.
Le débat concernant la justice américaine et son équité n'est pas inintéressant, même si j'ai un peu l'impression qu'on glorifie notre justice, totalement aux ordres, par rapport à celle des ricains qui dégueule de populisme….mais passons.
On a entendu un paquet de commentateurs dire que draguer n'est pas violer, que même harceler n'est pas violer, qu'être lourd, pressant, gras n'est pas être violeur….certes. C'est indéniable et on les remercie de ces précisions. Mais au fait…comment se fait-il qu'il soit acquis que l'on puisse se comporter ainsi tant qu'on reste du bon côté de la loi ?
Il est là le vrai problème ! Cette histoire, et celles qui ne manqueront pas de suivre soyons en certain (si j'avais de l'humour je dirais que Georges est le Tron qui cache la forêt, mais je suis assez chiant comme type et pas drôle pour un rond), met la lumière sur des comportements abjects qui doivent être évidemment éradiqués.
La parole ainsi libérée de nombreuses femmes est une bénédiction. Il m'est arrivé un jour de me retrouver dans un bar gay car avec ma compagne de l'époque on cherchait un de ses amis. Et c'était un bar plutôt trash, avec backroom refoulant le sperme et la sueur, chaleur étouffante et tout le toutim…et bien l'espace d'un quart d'heure je pense avoir ressenti ce que peuvent ressentir les femmes dans la vie quotidienne. Les regards lubriques, les sourires entendus, les mains baladeuses…bref un harcèlement latent, constant et d'une effroyable violence !

Je n'aime pas les féministes sous leur forme actuelle, et pourtant je comprends aujourd'hui qu'elles n'ont pas vraiment le choix de l'agressivité…bien que ça desserve à mon avis la cause qu'elles défendent.
Je ne peux pas blairer les nanas agressives à outrance et pourtant depuis le 14 Mai j'épouse totalement leur cause. Il nous parait à nous, les hommes, qu'il est normal de siffler une jolie nana, ça serait comme une marque de respect ou l'expression de notre satisfaction à la vue d'une jolie paire de fesses. Je suis certainement moi aussi macho parfois. Ou du moins conditionné comme tel.
La culture, les siècles d'éducation ont permis de rendre normaux des comportements qui ne le sont pas. Que ça soit d'ailleurs l'éducation des garçons comme celle des filles…

Alors vous comprenez pourquoi au fond je m'en fous du cas DSK. Je ne suis pas d'accord avec la curée et jusqu'à preuve du contraire il est innocent. Par contre je suis frappé par le fait qu'il est acquis que la séduction soit souvent, très souvent, empreinte d'une certaine violence. Il est très complexe de savoir où se situe la limite qui fait que le dominant obtiendra ce qu'il veut uniquement parce qu'il est en position de force ou bien que les deux parties soient équivalentes.
Je ne dis pas « égales » car évidemment que les hommes et les femmes sont différents, et heureusement d'ailleurs !
Ce qui est rassurant  est qu'en 50 ans de féminisme la cause des femmes et le regard que leur  portent les hommes a plus changé qu'en 2000 ans de civilisation….du moins de civilisation occidentale, car il existe des parties du monde ou le débat n'a pas lieu d'être et ou l'équité est la règle.
Personnellement, et ça n'est pas pour me vanter, j'ai aussi été soulé d'être dragué trop souvent et trop lourdement, et oui les femmes aussi en sont capables…néanmoins le monde est aux mains des hommes et les hommes ont beau penser qu'ils respectent les femmes ça n'est pas vraiment le cas.

Une fois de plus changer ça et donc améliorer le monde dans lequel on vit ne passera que par l'éducation…c'est marrant comme mon crédo sur l'éducation peut s'appliquer à tous les sujets, ou presque.

En attendant la suite de cette magnifique saga DSK-pognon-cul-procès-New-York, dont je ne manquerais pas une miette assumant totalement mon voyeurisme, il est intéressant de se poser la question de cette cohabitation Hommes-Femmes qui n'est pas toujours très glorieuse!

Sur ce je vous souhaite une excellente journée camarades !
HASTA SIEMPRE…

 



01/06/2011
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